Les Scandinaves
La Scandinavie à l’époque du Roi Arthur
est à une période de transition majeure : encore assez loin des Vikings
des siècles ultérieurs, la société scandinave au Vème Siècle est en
mutation : d’une société rurale égalitaire au départ, des changements
majeurs peuvent être distingués par l’archéologie : de plus en plus
d’inégalités dans les habitats, des maisons individuelles s’entourent de
clôtures.
La Société Scandinave
On commence à distinguer une aristocratie,
des regroupements locaux, probablement avec le même genre de tissu social que
les Germaniques : reiks élus par
l’aristocratie, hommes libres et tenanciers liés à des aristocrates, les futurs
jarls.
Les maisons sont de longs bâtiments rectangulaires
comprenant souvent plusieurs pièces et des étables dans le sud de la Norvège,
de la Suède et au Danemark. Elles peuvent contenir de 5 à 50 personnes selon la
taille. Le plus gros village reconstitué de cette époque devait comprendre 200
personnes.
Les activités humaines augmentent
considérablement à l’époque, avec pêche, agriculture (les champs deviennent
individuels), chasse au renne et à l’élan ; le travail du fer est commun,
on trouve du fer d’une qualité remarquable. De nombreuses traces de commerce,
en particulier avec Rome, sont retrouvées, et font la richesse du Danemark,
charnière entre la Scandinavie et le Continent. Chaque tombe de chef a son lot
d’objets en provenance des empires romains. On retrouve même à Helgö en Suède
un magnifique Bouddha de jade en provenance de l’Inde, daté du VIème
Siècle.
La concentration de la population
recommence à augmenter, et on retrouve plus d’une quinzaine de centres
économiques et politiques répartis dans toute la Péninsule, jusqu’aux îles
Lofoten au nord de la Norvège.
Les
Germaniques scandinaves
Un inventaire de ces peuples est ici.
Les
Finnois
Bien que de langue différente des autres
scandinaves, les sites finnois ressemblent assez à ce qui peut se passer en
Suède ou en Norvège : centres tribaux, commerce avec Rome.
Les
Samis
Les Samis, que nous appelons lapons,
occupent alors la majorité du nord de la Péninsule. Après une période de
maisons rondes assez imposantes, et correspondants sans doute à des habitats
d’été et d’hiver des siida, les
familles, la période arthurienne comprend des habitats plus légers et mobiles.
On retrouve des ateliers de récupérations en grande quantités de graisse de
phoques (sans doute destinée à l’exportation), ainsi que grande production et
de travail du fer.
Les Scandinaves et la Guerre
On retrouve des traces de détachements de
plusieurs centaines d’hommes avec archers, cavaliers, bien séparés. Les
forteresses comprennent des forts de collines, mais également des villages
fortifiés, des palissades voire des systèmes de blocage des fjords. Dans les
zones de prairies on trouve des forteresses rondes avec des gros murs et des
murs de terre autour.
La plus grosse forteresse du Gotland, à
Torsburgen, comprend un rempart de 2 kilomètres, rehaussé à 7 mètres de haut au
IVème Siècle. Elle était construite pour pouvoir compter un millier
de défenseurs, quand la population totale du Gotland ne devait pas dépasser
8000 personnes.
Au point de vue naval, on a découverts des
chantiers navals en Norvège pour de long bateaux fins de 30 mètres de long,
avec une cinquantaine de rameurs. Ces chantiers devaient comprendre 600 à 800
ouvriers. Les bateaux retrouvés par ailleurs sont également à rames, avec
souvent une trentaine de places de banc.
Il a souvent été estimé que les
Germaniques et les Scandinaves ne pouvaient se servir de ces bateaux pour la
guerre, et que le transport de troupes a été assez sommaire, mais des fouilles
au Gotland ont révélés des pierres taillées représentant de longs bateaux mais
à voiles. Ces pierres ont été datées du VIème Siècle !
La Religion des Scandinaves
Il serait idiot d’extrapoler complètement
la religion des Scandinaves des V-VIèmes Siècles de la religion
scandinave telle qu’on la connaît par la suite. En effet, ce que l’on sait fut
écrit au XIIIème par des individus profondément chrétiens, décrivant
la religion archaïque de leurs grands-parents, et ne peut s’appliquer
complètement à leurs ancêtres vivant 700 ans plus tôt. Ce serait comme de
décrire la Chrétienté du Vème Siècle comme celles de Croisades, mais
en pire, les Scandinaves n’ayant pas de tradition écrite entre ces deux dates.
Cependant, en recoupant avec leurs cousins
germaniques, on peut déduire plusieurs choses : ils devaient pratiquer un
polythéisme autour de dieux comme Odin, Thor, Tyr et Freja. Leurs chefs
devaient exercer à la fois des fonctions politiques et religieuses.
On ne connaît pas la religion des samis.
Celle des Finnois était, vers le XVIème Siècle, de type polythéiste.
Il serait stupide d’en tirer la moindre conclusion.
A l’aube d’une Ere Nouvelle
Cette époque est charnière à double
titre :
- Tout d’abord, c’est dans les trois
siècles qui suivent que va se former la société scandinave que l’on connaît
bien, celle de l’âge des vikings. Ainsi vont se former les grands Royaumes
Scandinaves du Moyen Âge : Danemark, Suède, et Norvège, ainsi que la
stratification de la société.
- Ensuite, si les peuples scandinaves
parlent une langue détachée du germanique commun, c’est du VIème au
IXème Siècle que va se produire ce que les linguistes appellent la
« syncope », qui va éloigner davantage leurs langages de ceux des
peuples germaniques.
Tentative de description des Peuples du
Nord
La seule description contemporaine des
Peuples Scandinaves « contemporaine » de l’époque d’Arthur est un
texte de Jordanès, auteur goth du VIème Siècle assez décrié, mais qui donne une
description qui, contrairement à d’autres sources, n’est pas calquée sur celles
de Ptolémée ou de Tacite…Il dit :
« Quant à l'île Scanzia, qui fait le sujet de notre discours,
elle est habitée par un grand nombre de nations diverses, quoique Ptolémée n'en
nomme que sept. On n'y trouve en aucun temps des essaims d'abeilles, à cause de
la rigueur du froid : dans sa partie septentrionale demeure la nation Adogit,
qui passe pour jouir sans interruption de la clarté du soleil pendant quarante
jours et quarante nuits au milieu de l'été, et qui en revanche, en hiver, se
trouve privée de la lumière pendant le même nombre de jours et de nuits. Ainsi,
alternativement dans la tristesse et dans la joie, elle jouit d'une faveur et
souffre d'une privation ignorées des autres pays. Veut-on savoir pourquoi?
C'est que dans les jours les plus longs les habitants voient le soleil repasser
à l'orient en longeant l'extrémité de l'axe de la terre, tandis qu'au contraire
dans les jours les plus courts ils ne peuvent plus l'apercevoir, parce qu'il
parcourt alors les signes du sud. Aussi ce même soleil, qui nous parait se
lever d'en bas, ils disent, eux, qu'il tourne le long du bord de la terre. Il y
a encore dans cette île d'autres nations, celles des Crefennes, au nombre de
trois, qui dédaignent de se nourrir de froment, et ne vivent que de la chair
des bêtes sauvages et des oiseaux, dont les nichées dans les marais sont si
multipliées, qu'elles suffisent à l'accroissement des espèces, et fournissent
surabondamment à la nourriture des habitants. Là demeurent aussi les Suethans,
qui se servent, comme les Thuringiens, d'excellents chevaux. Ce sont eux qui,
par le moyen du commerce, font passer aux Romains, à travers des nations
innombrables, les peaux de martres dont ceux-ci font usage. La belle couleur
noire de leurs fourrures les a rendus fameux. Mais ils vivent pauvrement,
tandis qu'ils sont vêtus avec la plus grande richesse. Après eux vient une
foule de nations diverses : celles des Theusthes, de Vagoth, de Bergio, de
Hallin, de Liothida, qui toutes ont leurs demeures sur une plaine unie et
fertile, ce qui les expose aux incursions et aux ravages des autres nations. On
trouve après ces peuples les Athelnil, les Finnaïthes, les Fervir, les
Gautigoth, race d'hommes intrépides, et toujours prêts à combattre. Ensuite les
Évagères, mêlés aux Othinges. Toutes ces peuplades habitent, à la manière des
bêtes sauvages, dans les creux des rochers, comme dans des forts. Par delà ces
nations demeurent les Ostrogoths, les Raumariks, les Raugnariks, les Finnes
pleins de douceur, les plus doux même de tous les habitants de Scanzia, les
Vinoviloth, les Suéthides, de la même race qui leur ressemblent : il est
pourtant vrai que ces derniers sont la souche des Danois, par qui les Hérules
ont été chassés des terres qu'ils possédaient. Les Cogènes surpassent tous ces
autres peuples par l'élévation de leur taille; et c'est à cause de leur haute
stature qu'ils aiment à se donner ce nom, qui les distingue de toutes les
nations de Scanzia. Du même côté sont encore les Graniens, les Aganzies, les
Unixes, les Ethelruges, les Arochi, les Ranis, dont fut roi, non pas dans les
temps les plus reculés, mais il y a bien des années, Rodulf, qui, prenant en
dégoût son royaume, se jeta dans le sein du roi des Goths Théoderic, auprès
duquel il trouva ce qu'il désirait. Toutes ces nations dépassent les Romains en
taille et en bravoure, et sont terribles par leur fureur dans les
combats. »
Certains de ces
peuples sont assez facile à placer, certains impossibles et d’autres peuvent
être sujets à diverses interprétations, selon les manuscrits. Que se passe-t-il
quand on recoupe cette description avec les données de l’archéologie ?
L’archéologie nous donne les zones suivantes :
Une zone Bleue correspondant à quelques restes archéologiques
appartenant à la culture Sami (pastoralisme et nomadisme), comprenant toutefois
des ensembles importants comme des mines ou des tombes (200 tombes à
Mortenses).
Une zone Rouge fortement habitée, de culture « nordique »,
avec des châteaux sur des collines et des terres cultivées.
Une zone Verte mixte avec ces deux modes de vie.
Une zone Jaune de culture « finnoise baltique », avec des
grandes fermes, mais sans centres de pouvoir.